Suite à notre note d’info du 22/09 concernant les conséquences des 3 arrêts de la Cour de cassation rendus le 13 septembre dernier, nous vous prions de trouver ci-dessous une synthèse de la situation et des conséquences pour l’entreprise :
Rappel de la législation sur les congés payés :
- Selon l’article L.3141-3 du Code du travail, les salariés ont le droit à 2,5 jours de congés payés par mois de travail effectif
- L’acquisition des jours de CP dépend de l’accomplissement d’un travail effectif ou assimilé défini par l’article L. 3141-5 du Code du travail
- Le Code du travail exclut notamment les périodes de suspension du contrat de travail du salarié en raison d’une maladie non professionnelle, et en prévoyant que seules les périodes d’absence pour accident du travail ou maladie professionnelle dans la limite d’une durée d’1 an sont assimilées à du travail effectif et permettent donc d’acquérir des jours de CP.
Toutefois, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) admet que le salarié peut acquérir des CP pendant sa maladie non professionnelle.
Cette position a été confirmée par la Cour de cassation le 13 septembre 2023, dont il ressort que :
- Le salarié acquiert des CP en arrêt maladie non professionnelle
- Le salarié acquiert des CP au-delà d’1 an en AT/MP
- le point de départ de la prescription du droit à CP ne peut commencer à courir qu’à partir du moment où l’employeur a mis le salarié en situation d’exercer son droit à CP
Ces décisions se basent notamment sur la Directive européenne 2003/88/CE du 04/11/2003 et sur la Charte des droits fondamentaux de l’Union Européenne du 07/12/2000 (devenue juridiquement contraignante le 01/12/2009).
Les décisions des juges ont un effet immédiat et rétroactif.
Il convient donc pour les entreprises de procéder à une évaluation du coût des CP qui pourraient être réclamés par des salariés dans l’entreprise en arrêt maladie et AT/MP au-delà d’1 an, en tenant compte d’une prescription de 3 ans (soit sur les périodes 2023/2022/2021). Pour les salariés ayant quitté l’entreprise depuis plus de 6 mois et signé leur solde de tout compte : il n’y a pas lieu d’en tenir compte, car le délai de contestation est passé (art L.1234-20 du Code du travail).
Tant que les conséquences de cette jurisprudence ne sont pas stabilisées, nous vous conseillons également de provisionner les sommes qui seraient potentiellement dues, pour le passé (pour les salariés toujours en poste) et, si vous choisissez de ne pas modifier vos pratiques, pour les arrêts de travail en cours ou à venir.
Les arguments pouvant être mis en avant face aux arrêts de la Cour de cassation :
- Ces arrêts sont contestables car ils donnent une interprétation trop extensive des textes européens qui n’évoquent que des principes et ne contiennent aucune disposition expresse sur l’acquisition de droit à CP pendant l’arrêt maladie. De plus, ils créent une discrimination positive et une rupture d’égalité entre les salariés en travail effectif et ceux absents qui bénéficient déjà d’un haut niveau de protection sociale durant leur arrêt.
- Les décisions de justice n’ont d’effet qu’entre les parties, de sorte que les décisions du 13/09/23 ne s’appliquent pas de plein droit à tous les salariés.
- Cette jurisprudence n’est pas encore stabilisée et nous sommes en attente de modifications législatives sur les CP qui devraient intervenir début 2024 en posant des limites de cumul et en fixant une période maximale de report.
- La volonté exprimée de la 1ère Ministre de « réduire au maximum l’impact de la mesure pour les entreprises ».