Jusqu’à présent, la protection des salariés contre les risques liés aux fortes chaleurs faisait l’objet de préconisations émises par l’administration et de dispositions générales dans le Code du travail.
Bien qu’émises dans des textes sans portée obligatoire, ces préconisations devaient être prises en compte par les entreprises dans la mesure où elles se fondaient sur les obligations générales de l’employeur en matière de santé et de sécurité des salariés.
Face à la multiplication des épisodes de fortes chaleurs, un décret n° 2025-482 du 27 mai 2025 est venu insérer dans le Code du travail un volet dédié à la prévention de ces risques.
Ainsi, la prévention des risques liés aux fortes chaleurs est renforcée à compter du 2 juillet 2025 et fait désormais l’objet d’une réglementation spécifique dans le Code du travail.
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- Une obligation générale de veiller à des conditions thermiques adaptées au travail
L’employeur à une obligation de maintenir les locaux fermés à une température adaptée au travail en cas de fortes chaleurs (article R. 4223-13 du Code du travail).
Les locaux fermés affectés au travail sont, en toute saison, maintenus à une température adaptée compte tenu de l’activité des travailleurs et de l’environnement dans lequel ils évoluent.
En cas d’utilisation d’un dispositif de régulation de température, celui-ci ne doit émettre aucune émanation dangereuse (article R. 4223-13).
NB : L’article R. 4222-1 prévoit déjà l’obligation pour l’employeur de veiller au renouvellement de l’air dans les locaux de travail fermés afin notamment d’éviter les élévations exagérées de température.
Renforcement de l’obligation pour l’employeur d’aménager les postes de travail extérieurs pour protéger les travailleurs contre les effets des conditions atmosphériques (article R. 4225-1 révisé).
NB : le Code du travail ne fixe pas de température maximale de travail. L’INRS donne comme valeurs repères les températures de 30° C pour une activité sédentaire et de 28° C pour une activité physique.
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- La prévention des risques liés aux épisodes de chaleur intense
Le décret insère un nouveau chapitre consacré à la prévention des risques liés aux épisodes de chaleur intense dans la partie réglementaire du Code du travail dédiée aux risques spécifiques d’exposition.
Ce chapitre reprend, pour l’essentiel, les recommandations de l’administration ainsi que le dispositif de vigilance reconduits chaque année par instruction interministérielle.
L’épisode de chaleur intense :
L’épisode de chaleur intense est défini par référence au dispositif de vigilance « canicule » développé par Météo France pour signaler le niveau de danger de la chaleur (article R. 4463-1).
Le dispositif de vigilance signale le niveau de chaleur de chaque vague selon l’échelle de couleur suivante :
L’employeur doit évaluer et prévenir les risques liés aux épisodes de chaleur intense en intérieur ou en extérieur :
S’il ressort de cette évaluation un risque d’atteinte à la santé ou à la sécurité des salariés, l’employeur doit adopter des mesures ou des actions de prévention définies :
- dans le cadre du programme annuel de prévention des risques professionnels et d’amélioration des conditions de travail (Papripact) dans les entreprises de 50 salariés et plus
- dans le document unique d’évaluation des risques professionnels (DUERP) pour les autres entreprises
Le décret précise les mesures envisageables de prévention (article R. 4463-3) :
Liste non exhaustive des mesures de prévention des risques liés aux épisodes de chaleur intense :
- la mise en œuvre de procédés de travail ne nécessitant pas d’exposition à la chaleur ou nécessitant une exposition moindre
- la modification de l’aménagement et de l’agencement des lieux et postes de travail
- l’adaptation de l’organisation du travail, et notamment des horaires de travail, afin de limiter la durée et l’intensité de l’exposition et de prévoir des périodes de repos
- des moyens techniques pour réduire le rayonnement solaire sur les surfaces exposées, par exemple par l’amortissement ou par l’isolation, ou pour prévenir l’accumulation de chaleur dans les locaux ou au poste de travail
- l’augmentation de l’eau potable fraîche mise à la disposition des travailleurs
- le choix d’équipements de travail appropriés permettant, compte tenu du travail à accomplir, de maintenir une température corporelle stable
- la fourniture d’EPI permettant de limiter ou de compenser les effets des fortes températures ou de se protéger des effets des rayonnements solaires directs ou diffusés
- l’information et la formation adéquates des salariés, sur la conduite à tenir en cas de forte chaleur et sur l’utilisation correcte des EPI de manière à réduire leur exposition à la chaleur à un niveau aussi bas que possible
- adapter les horaires de travail durant les périodes de forte chaleur, notamment pour les travaux en extérieur
- prévoir une rotation des tâches entre les salariés s’il n’est pas possible de décaler les horaires
- mettre en place des aires de repos ombragées
- augmenter la fréquence et la durée des pauses
- mécaniser certaines tâches
- installer des ventilateurs et/ou des climatiseurs dans les locaux comme dans certains engins de chantier
- prévoir des stores et des zones ombragées.
S’agissant de l’information et de la formation des salariés, celles-ci peuvent prendre la forme d’un affichage aux emplacements où les salariés exposés travaillent, de mails adressés aux salariés ou d’un rappel quotidien avant l’exécution du travail. Des supports d’information sont à la disposition des employeurs sur le site internet de l’INRS : ici
Les mesures de prévention doivent être adaptées pour certains travailleurs :
L’employeur doit adapter les mesures de prévention en liaison avec le service de santé au travail pour les salariés particulièrement vulnérables aux risques liés aux épisodes de chaleur intense, notamment en raison de leur âge ou de leur état de santé (article R. 4463-5).
Les mesures de prévention doivent être réévaluées en cas d’intensification de la chaleur :
Lors des épisodes de chaleur intense, l’employeur doit mettre en œuvre ces mesures et actions de prévention en les adaptant en cas d’intensification de la chaleur (article R. 4463-7).
Cette réévaluation doit conduire à une adaptation des mesures de prévention notamment pour les salariés vulnérables.
Si ces mesures restent insuffisantes, notamment pour les travaux accomplis à une température très élevée et comportant une charge physique importante, l’employeur doit alors décider de l’arrêt des travaux (Instruction ministérielle du 06/06/2024).
L’employeur doit organiser les secours en cas d’atteinte à la santé des travailleurs (article R. 4463-6) :
L’employeur doit prévoir un dispositif permettant :
- le signalement de toute apparition d’indice physiologique préoccupant, de situation de malaise ou de détresse
- des secours apportés dans les meilleurs délais à tout travailleur et, plus particulièrement, aux travailleurs isolés ou éloignés
L’obligation de fournir de l’eau potable fraîche est renforcée (article R. 4463-4) :
L’employeur à l’obligation de fournir une quantité d’eau potable fraîche suffisante en cas d’épisode de chaleur intense.
Il est également imposé à l’employeur de prévoir un moyen pour maintenir au frais, tout au long de la journée de travail, l’eau destinée à la boisson, à proximité des postes de travail, notamment pour les postes de travail extérieurs.
L’inspecteur du travail peut mettre en demeure l’employeur de prévenir les risques (article R. 4721-5) :
L’inspecteur du travail peut mettre en demeure l’employeur de se conformer sous 8 jours à son obligation de définir les mesures de prévention des risques associés aux épisodes de chaleur intense.
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- Entrée en vigueur : le 02 juillet 2025.